mercredi 30 mars 2011

Inégalités exorbitantes et indifférence générale

Les sommes perçues par quelques personnalités du sport sont astronomiques, hors de portée du commun des mortels.  Dans le champ sportif, les scandaleuses inégalités choquent peu de monde... (voir notre rubrique Economie)

mardi 29 mars 2011

"L’esprit du sport" : attention danger !

par Michel Caillat

Comment un phénomène social aussi massif, aveuglément valorisé, peut-il être accepté comme allant de soi ?
   Le sport est omniprésent dans notre vie quotidienne. « Elevé au cube » selon l’expression d’Umberto Eco (pratique, voyeurisme, bavardage) avec ses compétitions généralisées, « briseurs de soucis », ses foules à l’état pur vivant par procuration, et ses discours saturés d’idéologie, il échappe à tout échange de points de vue en dehors du cercle des initiés. Pour l’opinion publique et ses relais, seuls comptent les résultats, les médailles, les euphories collectives, les émotions sans pensée. La politique et l’intelligence sont mortes dès que l’on en « revient au sport »
   Comment un phénomène social aussi massif, aveuglément valorisé, peut-il être accepté comme allant de soi ? L’opposition des extrêmes (l’exaltation sans nuance des performances/la détestation farouche) sert l’anti-intellectualisme, les croyances et les préjugés. Non, le sport n’est pas un jeu neutre, innocent, anodin et vertueux ; il est porteur de représentations du monde et participe largement à la normalisation des corps et des esprits. En le présentant comme une bulle autonome surplombant la société, on oublie les conditions historiques et sociales de sa naissance et son fonctionnement comme « appareil de contrôle hégémonique et inerte » (Jean Chesneaux).
  Encore faut-il s’entendre sur le mot. Le sport doit être défini clairement et scientifiquement. Définir c’est rompre avec les notions de sens commun, tracer une frontière et exclure du sport ce qui lui ressemble et qui n’en est pas. Les sociologues sont au moins d’accord sur ce point : le sport est une situation motrice compétitive (avec compétitions à tous les niveaux désignant vainqueurs et vaincus), codifiée c’est-à-dire qui a ses règles (ce qui exclut les pratiques dites libres) et institutionnalisée (à l’intérieur des fédérations). Toute activité physique n’est donc pas du sport : le facteur qui fait sa tournée à bicyclette ou les ami(e)s qui se retrouvent après un repas pour courir tranquillement en bord de mer ne font pas de sport.
   Pierre de Coubertin était clair dès les années 1920 : « Le sport est le culte volontaire et habituel de l'effort musculaire intensif appuyé sur le désir de progrès et pouvant aller jusqu'au risque (…). Il lui faut la liberté de l'excès. C'est là son essence, c'est sa raison d'être, c'est le secret de sa valeur morale».
    Derrière ces mots, c’est une partie de la philosophie coubertinienne qui s’exprime : le culte du dépassement et du risque, la vocation à l’excès qui se donne aux forts et exclut les faibles et les femmes. Pédagogue de l’être, Pierre de Coubertin, à travers l’Olympisme, a une ambition qui va bien au-delà du sport et des Jeux : un projet d’éducation complète, une mission culturelle mondialiste, la croyance en une humanité harmonieuse symbolisée par le sportif. L’Olympisme est un « humanisme stoïcien », une « philosophie de la vie » (mots inscrits dans la Charte), et son idéologie se veut génératrice d’une profonde révolution morale.
   Le sport est une vision du monde ; il distille à flots les valeurs de l’ordre établi en leur donnant une existence pratique quasi naturelle. Il est un moyen d’exacerber l'individualisme et le mérite personnel, de promouvoir l'idéologie du don et le culte du chef, de faire l'apologie du rendement, du travail libérateur, de la douleur et de la souffrance, et de rendre acceptable l'inégalité, le cynisme du plus fort, le mépris des faibles, l'âpreté au gain. Avec le sport, l’idéologie dominante est intériorisée par les masses ; elle devient un moule de comportement, une seconde nature. Quand le fait sportif  s’incorpore, il se transforme en inconscient social.
   L’histoire du sport est celle d’un échafaudage idéologique : l’idéal olympique fondé sur l’universalité et la fraternité, et inspiré de la Grèce antique. À écouter ses chantres, l’esprit sportif irradie en tout être, et une lumière primitive et naturelle brille pour montrer à tous les hommes la splendeur des origines. La raison sportive nous fait contempler dans son essence la beauté des vérités éternelles : la franchise, la loyauté, le désintéressement dans l’ambition, la modestie dans la victoire, la sérénité dans la défaite, la chevalerie en toutes circonstances. Au commencement est le sport olympique antique dont la pureté, la perfection et l’universalité sont d’emblée saisies comme un idéal transcendant.
   Les « amis du sport » oublient une chose : l'idéal sportif est un oxymore. L’activité sportive est incompatible par nature avec ledit idéal. Le sport dit ce qu’il n’est pas (un univers enchanteur) et ne dit pas ce qu’il est (un outil de domination). Hommes politiques, militants progressistes et plus largement tous ceux qui rêvent d’une société plus humaine doivent combattre en eux-mêmes cette « volonté de ne pas savoir » sur le système sportif. Un système qui ne pourrait pas fonctionner sans un « esprit du sport » c’est-à-dire sans une adhésion subjective des individus, y compris celle des non-sportifs.
                                                                                      

lundi 28 mars 2011

    Rectificatif - Prépa Sciences Po et IEP 2012 - Thème du sport
Le thème du Sport étant retenu pour le concours Sciences Po 2012, le Centre d'Analyse Critique du Sport (CACS) propose aux étudiant(e)s intéressé(e)s de dialoguer* sur les  grands thèmes (sport et argent, sport et violence, sport et intégration, sport, foule et émotion, sport et progrès, sport et liberté, sport et religion, etc.). Sur simple demande, le CACS peut envoyer la liste des ouvrages qui composent sa bibliothèque riche en documents (une belle bibliographie) et des photocopies sur des sujets particuliers.  Michel Caillat,  responsable du CACS et auteur de divers ouvrages de sociologie du sport - participe également sur demande à toute conférence-débat (voir la rubrique conférence du blog).
. Seule condition : l'adhésion au Centre d'Analyse Critique du Sport (15 euros).
   Un espace inopportun a rendu l'adresse inutilisable. Il faut donc lire :
Pour tout renseignement  :
. (de préférence) adresse électronique : lecacs@live.fr
. téléphone : 06 82 57 55 73 (laisser un message sur le répondeur)
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* Le dialogue se fera au téléphone aussi longtemps et aussi souvent que le souhaitera la personne intéressée par l'échange et par les réponses  aux  questions qu'elle se pose.

samedi 26 mars 2011

Organiser un débat pour réfléchir au sport, phénomène social majeur de notre temps

« Fait social total » qui mobilise des millions de personnes sur la planète, le sport échappe encore à la réflexion. Or, le sport n’est pas un jeu neutre et anodin mais une vision du monde. Vous n’êtes pas convaincu ? Les conférences-débats du Centre d’analyse critique du sport (CACS) vous permettront de bien comprendre les enjeux politiques, économiques, idéologiques et culturels du phénomène sportif.

   Personne ne peut le nier : le sport sature notre espace et notre temps. Or, malgré ses centaines de millions de licenciés sur la planète (15 millions en France), ses milliards de téléspectateurs, son intégration totale à «l'économie-monde», son implacable marchandisation, sa puissance idéologique et son omniprésence dans la vie quotidienne, il reste un sujet méconnu et tabou.
    Sportifs et non-sportifs, hommes politiques, intellectuels, « glissent» sur l'institution soit par amour aveugle, soit par dangereux désintérêt de connaissance  (« le sport je m’en moque, ça ne m’intéresse pas »). Ce qui est possible pour l’Ecole, la Famille, l’Eglise et d‘autres institutions (l'armée, l’hôpital) à savoir le démantèlement du consensus ne l’est pas pour le sport. Pourquoi ?
  Le Centre d'Analyse Critique du Sport pense qu’il n’est plus possible de laisser hors de la réflexion le  champ sportif. Le sport (défini comme pratique compétitive, codifiée et non comme simple activité physique) n’est pas un jeu anodin et innocent mais une institution et une vision du monde. La pratique et le discours sportifs dictent des comportements, créent des besoins, modèlent les corps et les esprits. Pierre de Coubertin l’avait bien compris.
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